Vie des affaires
Date: 2025-02-25
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LA FRAUDE : CAS D’INOPPOSABILITÉ DE LA CESSION D’UN FONDS DE COMMERCE AU CRÉANCIER
Lorsqu’une société cède son fonds de commerce pour échapper au recouvrement des honoraires de son ancien expert-comptable, ce dernier peut demander en justice que la vente lui soit rendue inopposable.
Une telle action est, en effet, ouverte aux créanciers lorsque leurs débiteurs ont réalisé des actes en fraude de leurs droits.
Dans ce contexte, l’acte n’est pas annulé, mais il ne produit pas d’effet à l’égard du créancier lésé.
Dans cette affaire, la mission d’un expert-comptable auprès d’une société a expiré le 31 décembre 2016. La société ne lui règle pas tous ses honoraires.
En juin 2018, la société débitrice cède son fonds de commerce à une SAS, créée spécialement pour la reprise du fonds et détenue par le gérant de la société cédante.
En février 2019, la société débitrice est définitivement condamnée en justice à payer à son expert-comptable une certaine somme à titre d’honoraires. Cette société fait, par la suite, l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire.
L’expert-comptable considère que la vente du fonds de commerce est frauduleuse et a pour effet d’empêcher le paiement de sa créance. Il estime, en effet, que le débiteur a volontairement substitué un actif aisément saisissable (le fonds de commerce) à un prix de cession plus facilement dissimulable. Pour cette raison, il assigne la société, son gérant ainsi que la SAS afin de lui voir déclarer inopposable cette cession.
La demande de l’expert-comptable est d’abord rejetée par les juges de la cour d’appel, au motif que ce dernier ne rapporte pas la preuve de l’insolvabilité de la société résultant de la cession de son fonds de commerce.
Pour la Cour de cassation, la demande de l’expert-comptable est, au contraire, recevable. En effet, les juges du fond ont exigé, à tort, une condition non prévue par la loi : la preuve de l’appauvrissement du débiteur.
En pratique, l’inopposabilité de la cession du fonds de commerce à l’expert-comptable lui permet, pour recouvrer ses créances, de saisir les disponibilités issues de l’exploitation de ce fonds par le tiers complice (en l’occurrence, le gérant de la société débitrice).
Cass. com. 29 janvier 2025, n° 23-20836