Social
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Détachement
Les règles encadrant le détachement transnational de travailleurs seront renforcées en 2020
Pour limiter le dumping social lié aux disparités de statut entre travailleurs détachés et travailleurs locaux, les obligations des entreprises et les droits des travailleurs détachés en France dans le cadre d’une prestation de services vont être renforcés à partir du 30 juillet 2020. La directive européenne du 28 juin 2018, qui a révisé l’ancienne directive « détachement » de 1996, vient d’être transposée en droit français par une ordonnance du 20 février 2019. Comme la directive, cette ordonnance ne s’applique pas aux personnels roulants des entreprises de transport routier.
Égalité de rémunération entre travailleurs détachés et travailleurs locaux
Les travailleurs détachés en France doivent bénéficier d’un « noyau dur » de règles de droit du travail, fixées par le code du travail et les conventions collectives de branche. Ce « noyau dur » comprend notamment les règles en matière de salaire minimum et d’accessoires de salaire, de durée du travail et de congés payés, de santé et sécurité au travail, d’exercice du droit de grève (c. trav. art. L. 1262-4).
Ce «noyau dur» va être complété, puisqu’à l’avenir :
-les travailleurs détachés bénéficieront des règles en matière de rémunération au sens large, au sens de l’article L. 3221-3 du code du travail (qui remplace la notion de « salaire minimum et accessoires de salaire ») ;
-les travailleurs détachés bénéficieront des remboursements de frais professionnels engagés dans le cadre de leur mission, en matière de transport, de repas et d’hébergement.
Pour l’ensemble des matières du « noyau dur », l’ordonnance prévoit expressément que le travailleur détaché doit se voir appliquer une « égalité de traitement avec les salariés employés par les entreprises de la même branche d’activité établies sur le territoire national ».
Application de l’ensemble du droit du travail local en cas de détachement de longue durée
L’application au travailleur détaché du seul «noyau dur» de droits sera, à l’avenir, limitée dans le temps. Au-delà, le champ des règles de droit du travail applicables sera élargi, pour rapprocher encore la situation du travailleur détaché avec celle des travailleurs locaux.
« Noyau dur » valable pour 12 mois, prolongeables. – L’ordonnance prévoit que pour les détachements excédant une durée de 12 mois, le travailleur détaché doit bénéficier, à compter du 13è mois de détachement, de l’ensemble des dispositions du code du travail (sauf exceptions citées ci-après) (c. trav. art. L. 1262-4, II dans sa version au 30.07.2020).
Toutefois, si l’exécution de la prestation le justifie, l’employeur peut continuer à appliquer le seul « noyau dur » pour une durée supplémentaire d’au plus 6 mois (soit au total, 18 mois maximum).
Il doit alors adresser à l’administration une déclaration motivée avant l’expiration du délai de 12 mois, dans des conditions qui seront fixées par décret. À défaut, il s’expose à une amende administrative d’au plus 4 000 € par salarié détaché.
Au-delà, tout le code du travail à l’exclusion de certaines règles. – Une fois la durée d’application du « noyau dur » dépassée, le travailleur détaché relève en principe de toutes les dispositions du code du travail applicables aux entreprises établies sur le territoire national.
Toutefois, certaines règles du code du travail n’ont pas vocation à s’appliquer au travailleur détaché et sont expressément exclues.
Il s’agit des règles relatives à la conclusion, à l’exécution, à la rupture et au transfert du contrat de travail, à la modification du contrat pour motif économique, à la mobilité volontaire sécurisée, au CDD, au contrat de chantier ou d’opération, au contrat de mission à l’exportation, aux chèques et titres simplifiés de travail (CESU, TESE).
Nouvelles obligations en cas de recours à des travailleurs détachés intérimaires
Obligation d’information sur les règles de rémunération. – Afin de garantir une égalité de rémunération avec les travailleurs locaux, l’entreprise utilisatrice établie sur le territoire national, qui emploie des travailleurs détachés intérimaires, doit informer l’entreprise de travail temporaire située hors de France des règles applicables en matière de rémunération pendant la durée du détachement (c. trav. art. L. 1262-2-1 modifié au 30.07.2020).
À défaut, et si l’ETT ne respecte les règles en matière de rémunération, l’entreprise utilisatrice s’expose à une amende administrative d’au plus 4 000 € par salarié détaché (c. trav. art. L. 1264-2 modifié au 30.07.2020).
Obligation d’information en cas de « double détachement ». – De nouvelles règles sont prévues pour mieux encadrer les « doubles détachements ». On vise ici le cas d’une entreprise utilisatrice située hors de France, qui pour exercer une activité sur le sol français, détache des travailleurs intérimaires mis à disposition par une ETT également située à l’étranger.
Pour permettre l’application aux travailleurs détachés des règles françaises (dont la liste sera fixée par arrêté), l’entreprise utilisatrice devra informer l’ETT du détachement des travailleurs intérimaires sur le territoire national et de ces règles, ce avant le détachement (c. trav. art. L. 1262-2-1 modifié au 30.07.2020).
Ord. 2019-116 du 20 février 2019, JO du 21 ; https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000038149580